Cet article presente quelques reflexions a propos de la difference entre magie et religion dans la culture romaine. II s'interesse d'abord a quatre criteres souvent consideres comme propres au rite magique: la presence d'un intermediaire pour transmettre 1'effet de 1'action sur le destina-taire du rite; la possibility de contraindre les dieux a la volonte du magicien; le prejudice cause a 1'adversaire cible par le rite; le caractere solitaire et secret du rite magique. Or, une etude com-paratiste entre des descriptions des rites magiques et religieux permet de se rendre compte qu'aucun de ces quatre caracteres n'est specifique aux premiers. Meme si les rites magiques ont souvent ces caracteristiques, ils ne se differencient pas pour autant de fafon nette des rites religieux. Pour comprendre la vraie difference entre les deux fails religieux, il faut reflechir a la syntaxe propre a chacun. Rites magiques et religieux se basent 1'un et 1'autre sur des actes sacrificiels, utilisent des prieres et des offrandes. Mais le rite magique apporte des changements qui ont pour but de le rendre plus efficace. Le magicien, par exemple, utilise des ingredients inhabituels et rares qui ne sont pas propres aux rites religieux. En definitive, on peut definir comme «magique» ce qui excede 1'acte religieux accompli selon la tradition. La magie est une «hyperbole» de la religion: la difference entre les deux n'est pas qualitative, mais quantitative. II faut par exemple etre initie pour devenir magicien, tandis qu'aucune procedure n'est demandee pour devenir pretre. L'initiation represente une exageration du rapport normal entre hommes et dieux: a travers celle-ci, le magicien apprend a communiquer avec le monde divin de fason plus directe qu'on ne le fait normalement en pratiquant les rites religieux. A Rome la magie peut done etre definie comme un espace marginal de la religion qui represente un exces dans la communication avec les dieux.